La Loue, une rivière soit disant merveilleuse sur laquelle je n’avais jamais accroché. Sa réputation de rivière à Parigaux fortunés avait toujours servi de repoussoir pour moi. Mais cette année, lorsque Stef@ m’a proposé d’y monter pendant deux jours, j’ai laissé de coté mes préjugés pour aller voir.
Il faut dire que mon premier essai n’avait pas été très concluant. Il y a une dizaine d’année alors que comme tout bon fonctionnaire en début de carrière je gouttais de la banlieue parisienne, j’avais été invité à pêcher sur Chenecey. Un coup du soir où j’ai pris à un quart d’heure d’intervalle la même arc sur mouche de mai (j’ai cassé au ferrage la première fois et j’ai récupéré ma mouche la deuxième) suivi d’un orage violent qui a fait monté la rivière d’un mètre…
Mais ce premier contact m’avais conforté dans mon idée que je n’aimais pas ce type de rivière pour diverses raisons :
– les réglementations discriminantes pour les pêcheurs à la mouche qui vont de l’interdiction de pêcher à la mouche avant l’ouverture de l’ombre, à l’interdiction de pratiquer la nymphe, l’émergente, avec des wadders voire des lunettes polarisantes. Pour moi qui ne pêche qu’à la mouche et qui suis un partisan du fly.only nolimit c’est intolérable. Je vis ça comme une sorte d’aparteid. Et je ne pouvais pas cautionner ce système en le finançant.
– la complexité de la réglementation et le coût élevé de la pêche. En gros, pas de réciprocité, il faut pêcher avec un plan cadastral dans la tête (ou dans la poche), tenir un carnet de prises, tout y noter, pas dépasser la limite de telle propriété ou le milieu de la rivière… Bref, de quoi vous faire passer l’envie de pêcher. Sans parler du prix des cartes ou de l’impossibilité de pêcher certaines portions strictement privées ou réservées aux locaux. Un énorme choc culturel avec ce dans quoi nous baignons dans le sud de la France en réciprocité quasitotale.
– la sur-représentation de ces rivières de l’est de la France dans les revues. On ne voit qu’elles partout alors qu’on ne peut pas y pêcher.
Donc, jusqu’à ce voyage, plus ou moins conciemment, je boycottais ces rivières de l’Est de la France pour ne pas cautionner ce système.
Mais comme en ce moment, les pyrénées sont en pleine fonte et que l’envie d’évasion était trop forte, nous avons sauté dans la voiture à 3 heures du mat pour ne pas rater le coup du matin et l’émergence des brachys. 5 heures de route plus tard, nous voici en approche de Besançon. La région sous ce soleil printanier est magnifique. Cela me rapelle mes causses du périgord.
Puis nous arrivons chez Sanso. Le parcours est sompteux. On discute rapidement avec Louis-Jean qui s’en va sur la HRA et qui nous donne quelques conseils en fonction de ce qu’ils ont vu la veille.
Après avoir demandé l’autorisation de pêcher et de camper au propriétaire des lieux, nous filons installer les tentes.
C’est hallucinant comme l’eau est claire. On voit les dizaines de poissons comme dans un aquarium. Si on prend les lunettes polarisantes, on dirait qu’il n’y a pas d’eau. Pour quelqu’un qui est habitué à chercher les poissons dans des eaux plus sombres, c’est presque trop simple de les répérer.
N’étant pas habitué à ce type de pêche et sachant que j’ai très peu de chance de réussir sur mon premier voyage, je laisse le soin à Steph qui vient tous les ans de me montrer comment on s’y prend. Ben comme on peut. Le plus souvent à l’arbalette de par derrière sans se faire voir. Mais c’est beaucoup plus simple à dire qu’à faire.
Le problème c’est que quand on voit la truite, elle aussi nous voit. Une fois sur deux, elle part avant que le pêcheur n’a pu faire quoi que ce soit. Et si elle reste, elle part au lancer ou plus surement au posé de la nymphe. Ca fait pas un pli à chaque fois, c’est le même cinéma.
L’espoir renait toutefois lorsque j’en tape une en nymphe un peu au hasard il faut dire. Elle est petite mais je n’attrape pas de méditéranéenne tous les jours.
Pendant ce temps Stef arpente inlassablement les berges en essayant de surprendre un poisson actif et moins craintif et cela fini par payer.
Il ferre coup du coup deux poissons avec des robes typiques des rivières du coin. Chapeau l’artiste. J’ai beau essayer sa méthode, je n’arrive qu’à faire fuire les truites. En fait, je crois bien qu’il m’a laissé attaquer toutes les truites folles du parcours. Des poissons tellement pêchés qu’ils ont perdu la tête et n’ont plus une réaction normale. Par contre, il sélectionne les poissons mordeurs et arrive à les prendre.
En gros, il va me mettre cul rouge. C’est en quelque sorte normal, je débute sur cette rivière, je n’ai pas les mouches ni la technique. En revanche, on va prendre une grosse claque par un gamin de 12 ans qui à 13 heures en plein cagnard va secouer une truite énorme avec une cuillère vaironnée. Comme la publication de photos de poissons morts est interdite sur nos blogs, vous ne la verrez pas. Mais c’était un superbe poisson estimé à 55 cm. Paix à son âme.
En revanche, les ombres sont très actifs pour le plus grand bonheur de la foule de pêcheurs qui sont sur le parcours. Il y a des suisses, des italiens, des français. Tout ce beau monde pêche sur les frayères sans trop de scrupules.
Et à voire la densité ahurissante d’ombre, cela ne semble pas nuire à la population. Cela me confirme que ce n’est pas la pêche qui nuit aux poissons mais bien le prélèvement. J’avais déjà vu ça sur la Green aux US, en France c’est pareil. Lorsqu’on remet le poisson à l’eau, il y en a plus que lorsqu’on le mange.
Et il est vrai que lorsqu’on pêche en aveugle, sans voir le poisson, cela se traduit bien souvent par la prise d’un ombre. Sympa la nouvelle casquette Gobages.com non?
Pendant ce temps Stef, déploie son savoir faire pour capturer un très beau poisson qui nymphe / gobe derrière son rocher. Voilà une heure qu’il joue avec le vent, les lancers à l’arbalette avec le scion sur la queue du poisson, les refus et les mouches dans les branches…
Mais son savoir faire est à la mesure de sa patience. Il refera même son bas de ligne car le précédent ne lui permettait pas de faire le lancer adéquat. Sur ce genre de poisson, chaque détail compte.
Et dans un cri de délivrance, il sortira « sa » truite au combien méritée du tas de branches dans laquelle elle avait élu domicile.
Un sacré coup de ligne.
Le coup du soir du dernier jour sera particulièrement difficile. Nous avons réussi à trouver des truites en activité. Mais elles étaient quasiment infaisables. Sur des lisses de la mort qui tue, un gobages tous les 36 du mois toujours un mètre trop loin pour les atteindre… Par contre, des poissons monumentaux.
Ce sera pour une prochaine fois. Car prochaine fois il y aura. J’ai enfin trouvé un parcours où on peut pêcher comme dans le sud. Le parcours est suffisament long pour ne pas avoir à se soucier des limites, la nymphe est autorisée, la mouche est possible avant l’ouverture de l’ombre et la rivière est superbe. Depuis mon retour, j’en rêve la nuit.
Allez, un bon cassoulet avant de partir car la route du retour sera longue.
Dernière chose, j’ai pu dans ces conditions très difficiles où on a souvent qu’un lancer par truite apprécier la qualité de la Z- axis. Elle délivre des lancers d’une douceur et surtout d’une précision incroyable. L’idéal pour ce type de rivière. Elle est en passe de détroner ma vieille canne.
Merci Stef de m’avoir fait découvrir ce super parcours. On y reviendra. Promis. Et coup-ci, je me laisserai pas faire. LOL
Fred