A quel âge il m’a emmené la première fois ? En fait je sais plus, probablement dès que j’ai su marcher et me tenir dans un coin sans être trop chiant, c’est à dire assez tôt au vu de ma nature introvertie et ma capacité à rester en admiration plusieurs minutes devant une grenouille ou l’eau qui clapote. En tout cas, à 5 ans je savais déjà ferrer les gardons, même si, prévoyant, il me mettait un bon 18°° qui permettait à ces derniers un joli baptême de l’air après ferrage…
A même pas 10 ans, je l’accompagnais chez Barberot, aux sources de l’Eclimont, et ses virées mystiques (en plus avec mon instit de CM2 !!) sur l’Allier ou les rivières normandes me fascinaient…
Il m’a tout appris, monter les lignes, l’amorce, les leurres, les esches, les coins, tout sauf la mouche bizarrement, technique qu’il maîtrise pourtant, mais là n’est pas l’essentiel, il m’a transmis la passion. La fièvre qui transforme chaque journée de pêche en successions d’actes irrationnels, celle qui nous pousse au bord de l’eau quelles que soient les conditions météo, celle qui a fait que dès l’âge de 11 ou 12 ans je passais des journées entières dehors, un montage rudimentaire et quelques criquets avec moi dans les près corréziens…
Il y a le quotidien qui nous dévore, peut à peu je l’ai vu s’éloigner de la pêche, trouver que les rivières ne valaient plus le coup, ne plus se dégager le temps qu’il fallait, limiter la pêche aux vacances. Moi la fièvre empirait, il m’en fallait toujours plus, et c’est auprès d’autres que j’ai appris la mouche…
Alors pour mes trente ans, franchement, je pense que cette matinée au bord de l’Albarine, à 600 km de chez lui, c’est un des plus beaux cadeaux qu’il m’a fait… et de mon côté, en l’emmenant là, j’étais bien conscient qu’il allait faire une rechute. Je crois que je me suis garanti quelques parties de pêche avec lui pour les années à venir !
voilà le fautif, 25 ans après m’avoir inoculé les premières doses ! C’était une journée qui en appelle d’autres…